mercredi 21 novembre 2007

Lettre de démission de la secrétaire aux finances de l'AFESH

Par Andréann Cossette Viau

Collègues, camarades,

La présente est pour annoncer et expliquer ma démission du poste de secrétaire à la trésorerie du conseil exécutif de l’AFESH-UQAM. Mon intention de démissionner était connue, il est maintenant temps de vous informer des raisons qui me poussent à partir, soient ma perte d’énergie positive, ma volonté de militer ailleurs qu’au sein d’un exécutif, celle de briser le silence concernant les conflits internes et dénoncer les manœuvres de pouvoir au sein du conseil exécutif.

Tensions psychologiques

Il est évident que les évènements récents concernant la grève m’ont fatigué, mais jamais ceux-ci n'auraient eu une influence aussi grande sur mon moral sans tout le contexte autour.

Dans ce contexte, je me considère comme nuisible pour l’exécutif et même si ce n’était pas le cas, je refuse de perdre ma bonne humeur pour un poste.

Ce sont les conflits internes et la tension psychologique due à mon poste d’exécutante qui ont eu raison de mon moral. Les gens qui m’entourent m’ont vu entrer en poste avec confiance et bonne humeur. Les gens qui m’entourent me demandent maintenant qu’est-ce qui m’arrive.

Je suis devenue irritable, même avec les gens qui me sont les plus proches. Je pète les plombs pour des riens, j’arrive difficilement à travailler en équipe, je suis confuse et je me fâche beaucoup trop souvent pour qu’il soit agréable de me côtoyer politiquement.

Toutes ces tensions sont aussi reliées à un écoeurement profond que je ressens face à l’attitude de certains collègues de travail et à une dynamique d’équipe profondément lamentable.

Conflits internes

Le premier élément à avoir joué avec ma décision est les conflits au sein de l’association étudiante. L’affaire du processus d’embauche de la permanence politique à l’AFESH est beaucoup plus importante que ce que certaines personnes voudraient le faire croire. Elle crée des rapports de pouvoir malsains, elle divise le milieu militant et le mouvement étudiant en plusieurs cliques idéologiques.

La scission est de plus en plus marquée et parce que je suis idéologiquement et émotivement impliquée, la pression devient difficile à soutenir. Il faut savoir qu’en plus de diviser le milieu militant, cette affaire a fait ressortir les tensions au sein de l’exécutif même, particulièrement entre Alexandre Leduc, secrétaire à la coordination, et moi-même. Je me vois maintenant dans l’impossibilité de travailler avec certaines personnes et je suis convaincue que plus le temps avancera, plus mes prises de décisions seront sans compromis.

Poste d’exécutante

Tous ces conflits m’ont aussi fait comprendre que ma place n’est pas au sein d’un exécutif, du moins pas pour le moment. J’avais choisi de m’y impliquer pour deux raisons principales : l’expérience que ça m’aurait apportée et la possibilité de dépanner une équipe qui avait besoin de quelqu’un pour s’occuper des chiffres.

Mais devant l’ampleur du problème, je ne peux pas continuer en espérant prendre la parole comme je le souhaiterais. Dans cette position, je me trouve prise entre mon strict devoir d’exécuter les mandats qui me sont donnés et mon désir de dénoncer publiquement les stratégies qui me répugnent. J’ai fait mon choix.

Questions politiques

Je quitte en espérant contribuer à la levée de la culture du secret qui sévit au sein des instances exécutives de l’AFESH-UQAM, soit le conseil exécutif et la plénière intermodulaire.

Conseil exécutif

À travers la chronologie des évènements dont j’ai été témoin, je tenterai de démontrer quelle problématique le processus d’embauche a créée au sein du conseil exécutif.

Tout a commencé lors de la journée d’entrevue, le 16 octobre. Dès que j’ai demandé à Rémi Daigle, secrétaire à l’interne, comment les entrevues avaient été, il m’a dit que c’était une mauvaise journée. Il ne pouvait m’en dire plus parce qu’un huis clos avait été voté entre les trois personnes du comité de sélection. Il semblait visiblement très mal à l’aise dans la situation.

Le lendemain, nous avions un conseil exécutif, avant lequel Rémi avait réussi à faire accepter à David Clos-Sasseville de lever le huis clos. À ce moment, nous avons pu lire la correspondance du comité de sélection. Je trouvais particulièrement étrange que selon David Clos-Sasseville, l’offre d’emploi avait été conçue spécifiquement pour Dave Simard alors qu’il voulait ne pas retenir sa candidature en présélection. De plus, outre les propos diffamatoires de David Clos-Sasseville au sujet de Dave Simard, il y avait un débat concernant le rôle même de la permanence politique, débat que Rémi a voulu qu’on tranche en exécutif. Voulions-nous prioriser l’aspect « infographie » représentant David Simard ou l’aspect « recherche » représentant Marie-Ève Quirion[1]? (Les noms étaient censurés, mais la devinette était simple.)

Selon moi, il est évident que l’offre d’emploi adoptée par l’assemblée générale privilégie l’infographie et de la mobilisation, mais cherche aussi quelqu’un ayant des capacités pour la recherche[2]. C’est pourquoi j’ai formulé la proposition suivante : Que au besoin, lors du débat sur l’embauche de la permanence politique en PIM, le délégué de l’exec mentionne à la PIM que l’exec spécifie que le côté recherche soit axé sur la connaissance des instances uqamiennes, sur l’argumentaire politique et la mobilisation et que du côté infographie, on priorise le ou la candidat-e apte à non seulement faire le travail mais aussi à former les exécutants et les exécutantes, qui ne faisait que souligner le mandat de l’assemblée générale[3].

Suite à cela eue lieu la pénible plénière intermodulaire du 18 octobre : une énorme tension dirigée vers l’exécutif, les débats tournant autour du choix d’une candidature plus « militante » ou une candidature plus « recherchiste », le huis clos et le refus de la plénière de procéder à un vote permettant un deuxième tour m’ont tout de suite fait penser que certaines personnes voulaient éviter que Dave ne soit choisi.

Rémi se sentait très inconfortable. Il avait été honnête et avait choisi de défendre la candidature de Dave, considérant lui aussi qu’il était le meilleur choix possible en fonction de l’offre d’emploi. Il est ressorti de cette plénière très amer et ressentait énormément de pression. C’est à partir de ce moment qu’il a senti sa crédibilité mise à mal et que son humeur a influencé son travail. Il n’a pu assumer jusqu’au bout son choix politique.

Alexandre Leduc avait été fâché, lui aussi, du déroulement de cette plénière, mais refusait de considérer l’éventualité d’une manipulation du processus et de discuter de la problématique du rôle général de la PIM, préférant aborder la question du rôle de l’exécutif au sein de la PIM et banaliser les propos qu’avait tenu David Clos-Sasseville.

Puis sont sorties les premières contestations du processus. Les rôles se sont confirmés. Rémi Daigle se sentait très malheureux et confus, et ne pouvait donc s’affirmer sans équivoque. Alexandre Leduc a clairement pris position contre le rapport d’enquête et depuis ce temps, a toujours refusé de discuter franchement avec moi des questions qui y étaient abordées. Nous avons eu plusieurs conversations téléphoniques dans lesquelles j’exprimais mon malaise face à sa volonté de prendre position contre le rapport d’enquête, le réduisant à un « torchon » et refusant de le considérer dans son ensemble. Ses arguments ont toujours été les même, à savoir qu’une grille d’évaluation mal adaptée ainsi que des questions d’entrevue mal ciblées et un débat en PIM s’orientant vers les mauvaises questions n’étaient pas assez, ensemble, pour contester le processus d’embauche. À partir de ce moment, je me suis méfiée d’Alex.

J’ai des liens avec Dave Simard. Je l’expose ici. Le problème qui peut en découler est que de ce fait, plusieurs des analyses que je pourrais porter risquent de n'être écoutées qu'à la lueur de notre relation. Je me considère comme une personne sincère et ayant sens de la justice et de la vérité. Les personnes qui ont travaillées avec moi pourront en témoigner.

Ce n'est pas parce que Dave et moi sommes proches qu'on peut discréditer tout ce que je dirai concernant le dossier de l'embauche. Ça serait faire preuve de mauvaise foi et un manque de respect à mon égard.

J’admets aussi que dans ce dossier, j’ai dès le début pris position pour sa candidature. Je n’ai pas tenté de cacher qu’il était selon moi le candidat qui répondait le mieux aux critères de l’offre d’emploi adoptés en assemblée générale. Je n’ai pourtant pas cherché à utiliser mon poste d’exécutante pour le favoriser.

L’attitude d’Alexandre Leduc a démontré un flagrant manque de transparence. Il ne nous a jamais clairement dit pour qui il prenait, préférant orienter nos discussions informelles sur la stupidité de la contestation et sur l’inacceptabilité des propos concernant David Clos-Sasseville, son colocataire et ami.

Il s’est mis en contradiction lorsqu’il a proposé lors du conseil exécutif du 17 octobre que nous favorisions l’aspect « recherche » de la permanence politique, alors que nous savons que l’assemblée générale souhait qu’on embauche quelqu’un rapidement spécifiquement pour la grève à venir.

Lorsque est venu le temps d’embaucher Marie-Ève Quirion, il a décrété qu’il fallait qu’on signe son contrat dès maintenant. C’était non seulement ne pas vouloir tenir compte de la contestation mais c’était aussi vouloir contourner l’assemblée générale, qui normalement doit entériner l’embauche avant la signature d’un contrat de permanence. Voyant que plusieurs personnes de l’exécutif, dont moi, étaient totalement contre, il a tout de suite changé d’idée. Il a tout de même proposé au conseil exécutif qu’on prenne position en faveur du processus d'embauche.

Aussi, cette phrase d’un courriel est très révélatrice d’un manque de cohérence : « Elle [Marie-Ève Quirion] aurait en effet pu faire de la mob mais il aurait fallu qqun pour la coacher un peu. » Il met lui-même en doute les capacités de Marie-Ève Quirion mais refuse de considérer que la PIM a peut-être mal fait son travail d’embauche.

Je terminerais ma critique en mettant en relief son désir de vouloir restreindre le débat dans le champ de l’AFESH-UQAM : selon lui, les questions litigieuses internes ne concernent que les instances internes et nous ne devrions pas tenter de comprendre ce qui se trame à l'intérieur de ces instances si nous n'en faisons pas parti.

Il serait aussi intéressant de mentionner que Christian Pépin, secrétaire à l’information, a pris part aux débats sans même avoir lu le rapport d’enquête. Ceci est une autre preuve qu’en ce moment, le conseil exécutif est dépassé par les évènements et n’arrive pas à une consolidation, s’avérant pourtant nécessaire en ces temps de luttes pour un syndicat étudiant aussi militant que celui de l’AFESH-UQAM.

Plénière intermodulaire

Pour sauvegarder la démocratie directe au sein de notre association étudiante, nous devrons nous pencher sur le rôle et les pouvoirs de la PIM. Je crois qu’une révolution de celle-ci devra être entreprise. Preuve est faite qu’il est trop facile pour des personnes qui en ont l’intention de faire en sorte qu’elle ne respecte pas la tradition de l’orientation clairement militante de l’AFESH, ne serait-ce que par le fait qu’elle ne soit pas redevable à l’assemblée générale.

Le rapport d’enquête signé par Dave Simard et Sacha Desautels n’est pas simplement une enquête sur les personnes impliquées dans le dossier, mais bien aussi sur le fonctionnement de cette instance qu’est la PIM et en quoi résident en elle des rapports de pouvoir qui en ce moment dépassent l’assemblée générale. Elle doit se réapproprier dès maintenant les questions qui y sont abordées.

Il faut cesser de se taire sur la contestation du processus d’embauche de la permanence politique. Il est faux de dire que toutes ces questions sont privées. Elles sont politiques, nous le savons et en tant que militant-e-s, il est de notre devoir de chercher à comprendre les problématiques qui y sévissent : elles sont très souvent reliées à des problématiques beaucoup plus globales, qui ont des racines à l'extérieur.

Contrairement à ce qu’affirme Alexandre Leduc, il est nécessaire, de par les scissions qu’il crée au sein du mouvement étudiant militant en général, que le débat sorte du cadre des instances de l’AFESH-UQAM. Cessons de jouer à l’autruche. Ce sont des idéologies et des (in)tensions (sic) de pouvoir qui s’affrontent ici, des liens historiques sont à faire et vouloir éviter les questions qui se posent ne ferait que nuire à un mouvement déjà déchiré.

Sur le processus de la permanence politique, ma prise de position est sans équivoque. Je considère que celui-ci doit être refait en entier, et que la permanence politique devrait assurément être choisi par l’assemblée générale. Pour comprendre ma position dans tous ses détails, il vous faudra lire le rapport ainsi que tous les documents qui sont liés à cette affaire[4].

Conclusion

Je quitte parce que je ne peux plus collaborer au sein de l’équipe. Les réunions d'exécutifs interminables témoignent bien que notre équipe est loin d'être sur la même longueur d'ondes, et font perdre un temps précieux qui pourrait être consacré à l'organisation d'actions ou à la mobilisation. C’est aussi un choix politique et une façon de manifester ma dissidence face à certaines stratégies politiques. Je ne peux collaborer avec un collègue envers qui j'ai une méfiance significative et une vision très négative de sa façon de travailler.

Malgré ma démission, à moins d’un-e nouvelle ou nouveau élu-e à mon poste ou à moins que quelqu’un s’y oppose vivement, je continuerai d’aider aux finances jusqu’à la fin de la session. L’expérience politique que m’a offert le poste d’exécutante a été des plus bénéfiques pour mon apprentissage et je peux espérer qu’en ayant moins de réunions interminables mon militantisme ne s'en portera que mieux. J’aimerais aussi mentionner à Jean-Christophe Gascon, Catherine Brunet, Rémi Daigle et Caroline Lefebvre que j’ai adoré travailler avec eux et elles, en souhaitant que ma démission ne portera pas atteinte à de futurs projets communs.

Finalement, Marie-Ève Quirion a décidé de donner sa démission. Dans sa lettre, elle remercie Alexandre Leduc et Geneviève Gariépy pour leur appui mais accuse le conseil exécutif d’avoir fait preuve d’ostracisme envers elle. Dans le cadre de nos luttes, je trouve cette accusation grave et je demanderais qui, quand, où et comment un-e membre de l’exécutif aurait fait preuve d’ostracisme envers elle.

S'il y avait des questions, commentaires, incompréhensions, objections, je suis disponible et serai probablement encore souvent dans le coin du local de l’AFESH!



[1] http://permafesh.blogspot.com/2007/11/rapport-denqute-pour-la-contestation-de.html

[2] http://www.er.uqam.ca/nobel/afesh/IMG/pdf/OffreEmploi.pdf

[3] Voir le procès verbal du conseil exécutif du 17 octobre 07.

[4] http://permafesh.blogspot.com

Aucun commentaire: