dimanche 4 novembre 2007

Lettre de démission de la permanente politique

Par Marie-Ève, ancienne permanente politique

Aux membres de l’AFESH,

C’est avec regret que je remets ma démission du poste de permanente politique à l’AFESH, poste que je n’ai occupé que depuis le 22 octobre 2007. Ma démission est effective à partir du 2 novembre 2007. L’exaspération que je ressens par rapport aux attaques personnelles éhontées faites à mon égard par des candidats non retenus[1] influence inévitablement ma décision. Cependant, c’est en premier lieu devant les membres de l’AFESH que je suis redevable. Si je démissionne, c’est donc en raison des relations difficiles avec l’équipe de travail et de mon profond questionnement quant à la pertinence même du poste de permanence politique à l’AFESH. Avant d’exposer davantage les motifs de ma démission, je tiens à remercier chaleureusement les nombreux-ses membres de l’AFESH m’ayant manifesté leur soutien et leur appui, en particulier Alexandre Leduc et Geneviève Gariépy.

Indépendamment du dossier de l’embauche, il y a présentement des tensions tangibles au sein de l’AFESH. Le climat de déception généralisée par rapport aux perspectives de grève au plan national, mais aussi des mésententes, tant à l’externe (avec des membres de l’ASSÉ) qu’à l’interne (avec les membres de la PIM), semblent avoir rendu les membres de l’exécutif exténuéEs et dépitéEs. À titre de nouvelle employée, et fort consciente de ce contexte difficile, je me dois d’être indulgente. Mais ces considérations ne suffisent pas à accepter un climat de travail que je juge non seulement pénible, mais invivable.

Je déplore d’abord l’inconstance et l’inconséquence de l’exécutif. Par peur d’éventuelles représailles, la majorité des membres de l’exécutif se sont refuséEs à reconnaître mon embauche. J’ai donc commencé à travailler à l’AFESH sans l’appui collectif de l’équipe immédiate de travail, sans balise claire et sans discussion collective au sujet des attentes, besoins et projets. De plus, ma simple présence semble cristalliser les tensions.

On ne peut occulter les affinités et liens de proximité que certainEs membres de l’AFESH peuvent entretenir avec les personnes ayant posé leur candidature au poste de permanence politique. En ce sens, que plusieurs membres de l’équipe de travail auraient préféré l’embauche d’un autre candidat ne s’avère aucunement problématique. Ce que je considère cependant inconvenable, c’est d’ostraciser la personne embauchée en raison de déception individuelle liée au résultat du processus d’embauche. J’ai ressenti, à différents niveaux, de l’hostilité de la part de la majorité des membres de l’équipe de travail : être suspicieux-ses et remettre en question mes compétences ; m’instrumentaliser ; adopter des attitudes déplaisantes, voire méprisantes ; pratiquement ignorer ma présence à l’AFESH, etc. Je refuse désormais de travailler dans un tel climat de pression et de tension.

En plus de cette ambiance intolérable, l’absence de consensus à l’AFESH quant aux tâches à donner à la permanence politique pose problème. C’est d’ailleurs la permanente « généraliste » qui m’a exposé son malaise et son manque d’information sur la division des tâches qui devait être fait entre elle et moi. Cette situation rend la formation et la transmission des savoirs encore plus difficile. Il faut dire que c’est dans le contexte d’une éventuelle grève à l’automne que l’embaucher d’une nouvelle personne a été considérée comme une urgence.

Mais présentement, c’est la nature même du poste de permanence politique qui est selon moi à revoir. Pour faire suite à ma démission, je sollicite les membres de l’AFESH à requestionner l’embauche d’unE permanentE politique. Les membres de l’exécutif nécessitent certainement de l’aide supplémentaire. Mais pourquoi risquer de centraliser le pouvoir politique dans les mains d’une seule personne ? Les exécutantEs changent, mais les permanentEs restent. Ainsi, ce sont ces dernierEs qui accumulent l’expérience, les connaissances, les compétences techniques, les réseaux, les contacts, etc., ce qui a pour impact de fixer des normes, d’établir des modes de fonctionnement et bien sûr, de mettre le ou la permanentE en position d’autorité. Lorsqu’il est question de permanence politique ou militante, les risques de dérapage sont davantage élevés puisque cette personne a pour mandant de « former politiquement » les membres et de les conseiller.

Je crois donc qu’il serait intéressant d’envisager une autre formule, soit d’engager, sur une base ponctuelle, des personnes qui auront à travailler sur un projet particulier préalablement déterminé. Ceci permettrait d’aller chercher des expertises utiles dans des contextes donnés (exemple : production de matériel pendant une grève ; travail recherche sur un sujet d’actualité), mais surtout, cette formule éviterait la centralisation des pouvoirs. Nous revendiquons le droit à l’éducation gratuite, accessible et de qualité, alors le milieu étudiant doit être le premier à se réapproprier l’éducation, la formation, l’appropriation des outils… Les contractuels devraient avoir pour mandat de rendre accessible leur savoir et de donner une formation aux membres de l’AFESH, qu’il s’agisse de personnes ayant une expertise particulière en infographie, en archivage, en recherche ; d’excellentes connaissances des codes de procédures, des outils informatiques, des relations médiatiques, etc. Rendons accessible les connaissances militantes et décloisonnons le mouvement étudiant !

En somme, si le contexte actuel est difficile pour le mouvement étudiant, je crois plus que jamais en la nécessité de notre lutte. Les rapports de pouvoir sont omniprésents dans le milieu étudiant (par exemple, du sexisme, du racisme, de l’hétérosexisme, mais aussi de l’intimidation, de l’autoritarisme, de l’âgisme, de l’appropriation, de la centralisation, de l’ostracisme, des liens claniques, etc.). Il nous revient de démasquer ces rapports de domination afin d’arriver à les abolir et créer des relations basées sur la solidarité, la liberté et l’égalité. Mais aussi, il nous faut cesser les querelles claniques et infantiles afin de ne pas perdre de vue qu’ici et maintenant, nos droits sont saccagés, nos libertés perdues et plus que jamais, notre solidarité est nécessaire.



[1] Voir le Rapport d’enquête pour la contestation de la procédure d’embauche de David Simard et Sacha Desaultels, Lettre à l’assemblée et son amendement de Sacha Desaultels

Aucun commentaire: